La réforme de 1577

 

 

L’évolution des prix que nous avons caractérisée jusqu’ici ne faisait pas la différence, hors la discussion sur les paradoxes de Malestroit, entre la monnaie de compte et la monnaie de paiement. Avec la montée des prix, on assiste à une dévaluation de la monnaie de paiement qui est illustrée par le montant toujours croissant du nombre de sous auquel était prise la monnaie de change, l’écu d’or ou le teston d’argent, tant au cours légal qu’au cours volontaire ; ce dernier ayant parfois dépassé le cours légal de 10 à 30%.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette montée du cours de l’or témoigne entre autre de l’incapacité des autorités royales à contrôler les cours et à stabiliser la monnaie ? Cette montée des cours de l’or est soutenue par l’afflux de l’argent venant des Amériques, le ratio entre les deux passant de 1 pour 11,4 dans les années 1550, à 1 pour 12,5 en 1570-1572 avant de se stabiliser à 11,5 à partir de 1580.

La réforme de 1577 est un des résultats des états généraux de Blois. Elle peut se résumer à six grands axes :

• (a) la suppression de la livre tournois comme monnaie de compte, remplacée par l’écu dont le cours est ainsi défini de manière fixe à 60 sous, le sou n’étant en théorie plus qu’une division de l’écu ;

• (b) la fixation du cours du teston d’argent comme étant une subdivision de l’écu, et valant 20 sous ;

• (c) par ce biais, la réforme redéfinissait le cours légal des espèces, ainsi que leur hiérarchie et leurs rapports quantitatifs ;

• (d) elle définit le cours légal des espèces étrangères qui sont tolérées en France (une dizaine), et interdit d’usage les autres ;

• (e) elle est complétée par une ordonnance du 14/04/1578 interdisant l’exportation de toute matière d’or ou d’argent ;

• (f) enfin elle limite le caractère libératoire des espèces de billon(1) et des espèces de cuivre ; le billon ne pourra plus être utilisé au maximum que pour payer le tiers du montant d’une transaction.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Teston de Charles IX

Franc de la Ligue, Charles X

Double ecu d'or Henri III

Ecu d'or au soleil de Charles IX

 

Si la réforme a pu, dès sa première année d’application, stabiliser la valeur des moyens de paiement, le contexte social et politique ne permettait pas qu’elle apporte tous ses fruits, et surtout qu’elle participe au renforcement de la souveraineté monétaire du roi. Les guerres ont entraîné un flux important de monnaies étrangères dans le royaume, en particulier via l’Espagne qui a financé la Ligue, et des disparités régionales importantes qui ont influé sur les cours locaux. Des cours locaux, car, même si l’intention avait été de supprimer la monnaie de compte, dans la réalité le sou a remplacé la livre comme unité de compte, et les prix étaient exprimés en sous. Ainsi, d’une subdivision de l’écu, le sou a acquis le statut de valeur de base de l’évolution de l’écu dont le cours recommença à varier localement et suivant la conjoncture.

En 1602, l’édit de Monceaux restaure le compte en livre ; en 1614-1615, suite aux états généraux, un nouvel édit monétaire fixe le régime français.

 

 

Notes
(1) Le billon est un alliage d'argent et de cuivre, contenant souvent environ 50 % de cuivre, une teneur variable en argent, et auquel est ajouté environ 5 % de plomb. Cet alliage servit à la frappe de pièces dévaluées ayant le même cours que les vraies monnaies en argent, notamment dans le système monétaire romain dans l'Antiquité et également en France sous l’Ancien régime jusqu’au XIXe siècle. Contrairement à la monnaie d’or et d’argent, il s’agissait de petite monnaie circulant entre les mains du plus grand nombre et dont la valeur numéraire n’atteignait pas la valeur faciale. On distinguait le bon billon ou billon blanc contenant environ 50 % d’argent et conservant une couleur blanche malgré une proportion minoritaire d'argent (probablement grâce à l'ajout de plomb) du bas billon ou billon noir qui lui ne contenait pas plus de 25 % d’argent.

 

 

 

 

 

 

 

 

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